Expo Art for Land, du 4 février au 5 avril à Auroville, Inde

Comment protéger vos chères plaques d’enfournement

Protéger les plaques d'enfournement augmente leur durée de vie
Plaques d'enfournement en morceaux
Morceaux de plaques d’enfournement cassées, utiles pour enfourner des pièces émaillées si vous craignez que l’émail coule

Les plaques d’enfournement sont coûteuses, aussi la plupart du temps on les protège des gouttes d’émail qui coulent et autres accidents de cuisson. Certains se contentent de saupoudrer de l’alumine hydratée, d’autres préfèrent utiliser un mélange de silice et colle à papier peint pour faire une couche très épaisse qui protégera leurs plaques de dépôts de cendres excessifs en cuissons au bois.

Ceux qui utilisent des plaques en carbure de silicium n’ont pas besoin de les protéger, car l’émail s’en va tout seul quand les plaques refroidissent.

D’autres encore (en général lorsqu’ils travaillent seuls et sont très méticuleux), n’utilisent aucune protection pour leurs plaques, car ils veulent pouvoir les retourner à chaque cuisson pour minimiser la déformation.

En effet à l’enfournement, on peut choisir de varier leur position, en les retournant régulièrement (à la fois rotation et retournement « comme une crêpe ») : le poids des pièces que ces plaques doivent supporter et la chaleur intense répétée ont pour effet qu’elles fléchissent, aussi les retourner régulièrement permet de minimiser cette déformation. D’autres céramistes préfèrent ne jamais retourner les plaques d’enfournement « comme une crêpe » afin d’éviter que des petits morceaux de mélange de protection des plaques se détachent et tombent sur les pièces disposées sur la plaque inférieure. 

Mélange de protection prêt à l’emploi

Pour protéger vos plaques si vous êtes nouveau dans le monde de la céramique, le plus simple est d’acheter un mélange protecteur vendu chez nos fournisseurs sous le doux nom de « bat wash » : mélanger cette poudre avec un peu d’eau (n’oubliez pas de porter un masque FFP2 ou FFP3 au moment du mélange avec l’eau) et passer plusieurs couches entrecroisées à l’aide d’un pinceau large.

Si vous préférez composer votre propre mélange à partir de matières premières très réfractaires (= qui ne risquent pas de fondre aux températures auxquelles vous travaillez), le principal avantage est de pouvoir l’adapter à vos besoins spécifiques. Pour comprendre les recettes qui suivent, le principe est le suivant : 

Les matières premières HYDRATEES vont avoir un retrait plus important que les non hydratées : normal, puisque les molécules d’eau s’échapperont des premières sous forme de vapeur. 

Kaolin et molochite : c’est quoi la différence ?

Ainsi le kaolin va avoir un retrait plus grand que le kaolin calciné (qu’on appelle aussi molochite). En outre kaolin et molochite contiennent de la silice. 

Et l’alumine hydratée aura un retrait plus important que l’oxyde d’aluminium (qu’on appelle aussi alumine).

L’inconvénient des produits déshydratés c’est qu’ils coûtent plus cher – donc bon à savoir : vous pouvez aussi déshydrater ces matières premières vous-mêmes, tout simplement en les cuisant dans votre four.

Recettes de mélanges protecteurs à composer vous-même

La recette de base est : 50% silice + 50% kaolin

Recette alternative 1 : 50% silice + 50% alumine hydratée

Recette alternative 2 : 50% silice + 50% oxyde d’alumine

Ces recettes conviennent pour les basses et moyennes températures en four électrique (pas pour les cuissons au bois, au sel ou à la soude). Les limites (ou inconvénients) de ces recettes c’est qu’elles contiennent de la silice :

(1) si une grande quantité de glaçure coule, elle peut se lier à la silice

(2) lorsqu’on nettoie les plaques, on respire de la silice.

Alors, peut-on éviter d’utiliser cet ingrédient ?

La recette suivante : 50% kaolin + 50% alumine hydratée convient à tous les types de fours (aussi pour les cuissons au bois, au sel ou à la soude)

On peut augmenter le kaolin à 60% et diminuer l’alumine hydratée à 40% afin de diminuer le coût.

Un problème fréquent est que cette couche de protection craquèle et s’effrite, avec le risque de retrouver des petits morceaux à l’intérieur d’un bol émaillé. La raison est le retrait de l’argile – et le kaolin est une argile. La solution est de remplacer une partie du kaolin par du kaolin calciné (= molochite) : la calcination va éliminer toute l’eau (donc éliminer le retrait) tout en gardant les propriétés réfractaires. On peut calciner du kaolin facilement en le mettant dans un bol en cuisson biscuit, et on peut aussi en trouver chez nos fournisseurs si on ne veut pas le calciner nous-mêmes.

La recette devient : 25% kaolin + 25% kaolin calciné + 50% alumine hydratée.

Enfin s’il y a beaucoup de turbulences dans votre four vous pouvez ajouter 1 à 2% de feldspath afin de faire « coller » le mélange protecteur. Choisir la quantité de feldspath comme suit : après cuisson, passer le doigt sur la plaque. Si tout se décolle, augmenter la quantité de feldspath, jusqu’à ce qu’on puisse rayer avec l’ongle. S’il faut une lame pour décoller, c’est qu’il y a trop de feldspath.  

Mon truc : utiliser du sable blanc de rivière

sable blanc de rivière sur plaque réfractaire en cuisson oxydante
saupoudrer le sable sur la plaque réfractaire en dehors du four

Encore une suggestion : en four électrique (uniquement) on peut – en plus du mélange protecteur – ajouter une fine couche de sable blanc sur les plaques (par exemple acheter un sac de « sable de Fontainebleau » : cela doit être du sable blanc fin de rivière donc ne contenant ni sel, ni fer). Ce sable est composé de petits grains, ce qui permet aux grandes pièces de « glisser » sur ces petits grains lors de leur retrait, et cela crée pour toutes les pièces une petite protection supplémentaire au point de contact.

Attention en four à flamme, vu le déplacement d’air chaud dans le four, le sable est à proscrire car il se déplacerait et se déposerait sur vos pièces émaillées. 

Pour une cuisson émail je saupoudre le sable en dehors du four, je nettoie les bords de la plaque réfractaire sur environ 2 cm pour éviter que des petits grains de sable tombent dans l’émail des pièces qui ont été enfournées plus bas. 

Si vous n’êtes pas certain de votre sable testez-le : prenez une coupelle en grès dégourdie et remplissez-la du sable que vous voulez tester, faites cuire lors d’une cuisson de haute température, et observez si le sable peut être “re-désagrégé” après la cuisson. S’il forme un bloc, utilisez-le pour autre chose !

Pour les curieux

Aluminium = Al dans le tableau de Mendeleiev

Oxyde d’aluminium ou alumine = Al2O3 

Kaolin = Al2O3 2SiO2 2H2O

Kaolin calciné ou molochite (l’eau 2H2O est partie) = Al2O3 2SiO2′

Alumine hydratée = Al2O3 3H2O

Facebook
WhatsApp
Twitter
LinkedIn
Pinterest

15 réponses sur « Comment protéger vos chères plaques d’enfournement »

Bonjour, comme il n’est pas “super important” d’être “super exact” dans le cas qui nous occupe, les recettes sont en volume. Merci d’avoir posé cette question ! Joëlle

Bonjour,
Merci beaucoup pour votre article !
J’ai réaliser un engobe de protection pour mes plaques puis je les ai cuites jusqu’à 950°. A la sortie du four l’email est comme pas cuit, poudreux et se décroche de la plaque. Vous pensez qu’il faut les cuires plus fort ?

Bonjour Aurélie, vous parlez d’engobe, puis d’émail pas cuit et poudreux : il y a confusion. Je suppose que vous parlez toujours de l’engobe ? Parce que l’objectif de cet engobe c’est bien que l’émail se détache, par exemple s’il forme des gouttes qui tombent sur la plaque. Ensuite j’ai besoin de plus de précisions pour répondre. Quelle recette d’engobe avez-vous utilisée ? Quel est votre objectif de température d’utilisation – autrement dit est-ce que vous comptez utiliser ces plaques à basse ou à haute température ? Avez-vous validé la température indiquée sur votre programmateur par des cônes ?

Merci beaucoup pour votre réponse 🙂 En effet je me suis trompé, je voulais dire que l’engobe de protection est poudreux et se détache comme si il n’était pas cuit. Ma recette a été : 40% kaolin, 40% alumine calciné, 20% silice. J’ai fait une seule cuisson, avec l’engobe et j’avais mis seulement les plaques. Je fais de la cuisson basse température (max 1080°). Je n’ai pas de cones, mais j’ai déjà utilisé ce four plusieurs fois avec de bons résultats. Peut-être que je dois cuire un peu plus chaud et tenir la chaleur maximale plus longtemps ..

Je comprends mieux : vous utilisez uniquement des matières premières très réfractaires, c’est la raison pour laquelle l’engobe reste en poudre, c’est tout à fait normal. “Un peu plus chaud” ne suffira pas.

Bonjour, merci pour votre article.
Je pensais faire la recette 25% kaolin + 25% kaolin calciné + 50% alumine hydratée, et me demandais jusqu’à quelle température considère t’on que c’est de la “moyenne température?”. Cette protection peut-elle convenir aussi pour une cuisson de grès (1280°C). Si ce n’est pas le cas, auriez-vous des indications pour une protection des plaques de four pour cuissons basse et haute température? D’avance merci.

Bonjour Mathilde,
Mon article a pour objet de donner une initiation au comportement des matières premières que l’on met en oeuvre afin d’aider à résoudre quelques problèmes.
Il ne se substitue pas à des essais, que l’on peut calibrer et prévoir grâce à cette compréhension.
Les températures en céramique sont un continuum. En général on parle de basse température dans le domaine de la faïence, de moyenne température autour du cône 6 et de haute température à partir du cône 8.

Bonjour, je viens de vous découvrir merci beaucoup pour toutes ses infos !👌
Je viens d’acquérir un four électrique, j’ai réalisé ma première cuisson et quand j’ai ouvert mon four j’ai eu la mauvaise surprise de retrouver une plaque coupée en deux, j’avais déjà mis le produit de protection. Sur 3 étages une plaque cassée. Le lendemain j’ai lancé une deuxième cuisson : deuxième plaque cassée en deux. Il me reste que celle du font.
Savez vous la cause de ce problème svp?

Bonjour, je ne peux que supposer la cause de ce problème, car je dispose de très peu d’éléments.
Les plaques sont constituées de pâtes très riches en réfractaires (tout comme les briques du four). Pour les plaques, la pâte est coulée dans des moules, ensuite ces plaques sont cuites à relativement basse température avant d’être vendues. L’objectif est qu’elles soient suffisamment solides pour être transportées et manipulées, mais il vous appartient de réaliser une pré-cuisson, en suivant des montées en température progressives et des paliers suffisamment longs, afin que les transformations du réseau cristallin se fassent correctement au sein de la matière. (Idem pour les fours : un four neuf doit d’abord être “rodé” : j’expliquerai dans le détail la cuisson de rodage dans un prochain article de blog et ce qui se passe à chaque étape).
Autre hypothèse : avez-vous bien mis les supports de plaque les uns au-dessus des autres, et 3 par plaque ? Si vous avez effectué le chargement en ne suivant pas cet alignement, la tension – dans des plaques neuves de surcroît – ne peut qu’engendrer de la casse.

Bonjour, merci pour toutes ces informations très intéressantes… je me pose une autre question ? quand faut-il changer cet enduit ? et surtout comment le retirer de la plaque pour en mettre un nouveau sans abîmer les plaques ?

Merci par avance pour votre réponse.

Bonjour, tout dépend de la fréquence à laquelle vous réalisez des cuissons, et si vous “salissez” beaucoup les réfractaires ou pas. Il est parfois nécessaire de passer les plaques au dremel pour ôter des résidus d’émail… Ensuite poncer légèrement et réappliquer la couche protectrice.

Bonjour Joëlle,
Mon mélange haute T° pour plaques est molochite 1/3 + alumine calcinée 2/3, mélange communiqué par mon prof de céramique il y a 30 ans et qui fonctionne plutôt bien. J’ajoute comme vous un soupçon de sable de Fontainebleau (ramassé dans la nature, en Ile-de-France, quelques veines arrivent jusqu’à chez nous). Cela permet aux pièces (porcelaine) de glisser facilement au retrait et évite effectivement d’avoir à réparer quelques éclats d’engobe, voire même à boucher provisoirement les manques sur les plaques en raclant à niveau avec une carte plastique. Ce sable me sauve aussi pour rattraper des plaques gondolées en passant cette fois une large règle sur une couche de sable plus épaisse. Mes larges plats-très-plats le reste de cette façon !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Suivre mes formations

La technologie de la céramique vous intéresse ? Vous souhaitez approfondir des notions de santé et de sécurité, de chimie des émaux ou de gestion des surfaces alimentaires ?

Mes formations en visioconférences et en vidéos sont faites pour vous ! 

Articles récents
Mes réseaux sociaux