Tant qu’elles n’ont pas été cuites, les pâtes céramiques peuvent être recyclées (dans cet article je parle tantôt d’argile et tantôt de “pâte céramique” : voir ce lien qui explique la différence).
Dans la plupart des ateliers, ce recyclage est complètement manuel et représente un travail important – et pas le plus agréable ni gratifiant, alors autant comprendre les erreurs à éviter. En fin d’article je partage également un petit truc qui fait gagner bien du temps.
Connaître le comportement de l’argile : expérience facile à réaliser
Pour mieux connaître votre matière première je vous suggère de réaliser une petite expérience à l’aide de deux bocaux transparents que vous remplissez d’eau. Dans l’un, immergez un morceau d’argile à consistance cuir, et dans l’autre, immergez un morceau d’argile totalement sec. Observez ce qui se passe : des micro-bulles vont immédiatement sortir de l’argile sèche, en quelques minutes elle se retrouve complètement dissoute. Et dans l’autre bocal, rien ne se passe.
Conclusion : l’argile sèche absorbe l’eau. L’argile à consistance cuir n’absorbe rien, et restera dure dans le seau de recyclage. Donc éviter de mettre dans le seau de recyclage de l’argile à consistance cuir : d’abord la faire sécher et lorsqu’elle sera totalement sèche, vous pouvez la mettre dans le seau de recyclage où elle se dissoudra au contact de l’eau.
Le recyclage en pratique
La vidéo donne déjà pas mal d’éléments, mais dans le texte je donne des éléments supplémentaires : par exemple que faire avec les paquets qui ont complètement durci.
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On peut donc laisser toute l’argile à recycler sécher complètement. Ensuite on l’immerge dans de l’eau (idéalement de l’eau douce) jusqu’à ce qu’elle se dissolve (quelques heures). Ensuite, on ôte l’excès d’eau éventuel qui stagne au-dessus et on remue le tout. On la pose sur une surface absorbante – idéalement un plâtre – soit en un seul « gros tas », ou alors on façonne des petits tas séparés, qui auront l’avantage de sécher plus vite et d’avoir un format qui sera facile à malaxer par la suite.
Après quelques heures (entre 12 h et 3-4 jours selon l’humidité de l’air et la température), on arrive à décoller ces « petits tas » de leur support. A ce stade je les malaxe entre mes mains (je veux dire que je ne les malaxe pas encore sur la table de malaxage, car c’est encore trop collant) et je leur donne la forme d’une boule. Il est préférable d’éviter qu’une croûte dure se forme en surface alors que le cœur des boules est encore très humide. Pour cette raison je passe régulièrement dans l’atelier vérifier l’état du séchage et je remalaxe plusieurs fois rapidement ces boules. Lorsqu’elles ont atteint la consistance idéale, soit je les utilise immédiatement, soit je les emballe. J’utilise de préférence un seau en plastic avec couvercle, ou à défaut je les emballe dans un plastic, car je ne dispose pas d’une cave humide où les conserver.
Mais faire sécher toute l’argile à recycler avant de la réhumidifier représente un gros travail. Le système suivant permet une économie d’énergie musculaire (!) et de temps.
- Les pièces qui s’effondrent au tournage sont immédiatement mises en boule sur le côté, et remalaxées en fonction de l’humidité ambiante entre 1 heure et quelques heures plus tard – puis réutilisées, ou conservées dans un seau ou un plastic bien fermé.
- Un grand seau « recyclage » sert à récupérer les déchets de tournage et les tournassures : il s’agit soit d’argile très humide, soit des tournassures qu’on n’agglomère pas avant de les mettre dans le seau (comme elles sont fines, elles vont se dissoudre). L’eau ajoutée est l’eau de tournage, afin de récupérer les particules les plus fines. Attention aux éponges qui traînent et parfois aux outils oubliés. Pas d’argile à consistance cuir dans ce seau.
- Les pièces à consistance cuir (par exemple celles qu’on abandonne au moment du tournassage parce qu’on est passé au travers ou parce qu’elles sont moches ou déjà trop dures) ne vont PAS dans ce seau ! En effet elles ne vont pas se dissoudre (je sais je me répète, mais voir votre petite expérience décrite en début d’article). C’est un gros gain de temps de les laisser complètement sécher AVANT de les mettre dans le seau de recyclage : les pièces sèches vont se dissoudre au contact de l’eau, au lieu de rester des morceaux durs.
- Suite du processus : voir plus haut.
Que faire avec les paquets entiers qui ont durci ?
Un autre problème : les paquets entiers d’argile durcis.
- Solution 1 : les transpercer à de multiples endroits à l’aide d’une lame ou d’un tournevis, immerger le paquet (avec ou sans son plastic d’origine) quelques heures dans un seau, jusqu’à pouvoir couper des tranches et remalaxer.
- Solution 2 : couper des « tranches » que l’on lacère et faire passer une serviette éponge détrempée en accordéon entre les tranches, le tout dans une caisse en plastic recouverte d’un plastic supplémentaire. Attendre quelques heures et remalaxer.
- Solution 3 : si le paquet est trop sec pour un de ces traitements, enlever le plastic et attendre qu’il sèche “à coeur”, ensuite l’immerger dans de l’eau.
Minimiser ce travail de recyclage
Le recyclage est un aspect contraignant et fatigant du travail dans l’atelier, alors lorsque de la pâte est occupée à sécher, il s’agit de vérifier très régulièrement sa consistance, car si elle sèche trop on peut tout recommencer.
Très souvent, je mélange des boules plus dures avec d’autres plus molles pour obtenir une consistance idéale ; dans ce cas, je les coupe en assez fines tranches que j’alterne avant de malaxer le tout, c’est la technique du sandwich. Lorsque j’obtiens enfin la consistance souhaitée, je malaxe avant de la stocker dans un sac en plastique bien étanche. Et je préfère stocker de l’argile un peu molle que trop dure. Une argile dure est ce que j’appelle de « l’argile à tendinite » pour un tourneur !
Il est important de recycler proprement : de veiller à ce qu’il n’y ait rien d’autre que de l’argile dans les seaux de recyclage + dans un atelier collectif ON RECYCLE BIEN EVIDEMMENT PAR SORTE D’ARGILE ! Regardez ce qui est écrit sur les seaux.
Poser un drap sur le plâtre = truc efficace
“Truc maison” permettant un gain de temps : poser une serviette de cuisine ou un vieux drap sur le plâtre avant d’y mettre la terre humide, car faire tremper une serviette pour ôter l’argile représente moins de travail que nettoyer le plâtre.
Différentes techniques de malaxage existent : en “bélier” (aussi appelée en “tête de boeuf”), en spirale (ma préférée)… et pour recycler de grandes quantités d’argile, le malaxage peut aussi se faire avec les pieds !